On explique très-diversement l’origine de la kabbale. Les adeptes de cette science, parmi lesquels il faut comprendre plusieurs mystiques chrétiens, tels que Raymond Lulle, Pic de la Mirandole, Reuchlin, Guillaume Postel, Henri Morus, la regardent comme une tradition divine aussi ancienne que le genre humain. Ils supposent qu’un ange appelé Raziel, c’est-à-dire l’ange des mystères, vint par l’ordre de Dieu l’enseigner à Adam, dans le moment où celui-ci, chassé du paradis terrestre et accablé par sa chute, avait besoin pour se relever d’un secours surnaturel. D’autres moins ambitieux ne la font remonter que jusqu’aux temps de Moïse, soutenant qu’elle a été révélée sur le mont Sinaï en même temps que la loi, et conservée à l’état de tradition chez un petit nombre de sages, jusqu’au retour de la captivité de Babylone. Enfin, comme un excès en provoque toujours un autre, plusieurs critiques n’ont vu dans la kabbale qu’une servile imitation du mysticisme arabe ; de ce mysticisme bizarre, exalté, qui s’est développé au commencement du xi° siècle par le contact des idées d’Alexandrie avec l’esprit musulman, et dont Avicenne (voy. Ibn-Sina) est l’expression la plus complète. Il résulterait de cette supposition que les livres kabbalistiques réputés les plus anciens ne sont qu’une imposture forgée à plaisir, et que le plus important de ces livres, celui qui a pour nom le Zohar, est une compilation indigeste d’un rabbin espagnol du xiii° siècle, appelé Moïse de Léon. De ces différentes opinions, les deux premières sont au-dessous de la critique : nous ne les avons citées que pour montrer de quel culte superstitieux la kabbale a été l’objet. La troisième, quoique soutenue avec beaucoup de talent par des savants du premier ordre, a contre elle des témoignages et des faits de toute nature. Quand on examine la kabbale en elle-même, quand on la compare aux doctrines analogues, et qu’on réfléchit à l’influence immense qu’elle a exercée, non-seulement sur judaïsme, mais sur l’esprit humain en général, il est impossible de ne pas la regarder comme un système très-sérieux et parfaitement original. Il est tout aussi impossible d’expliquer sans elle les nombreux textes de la Mischna et du Talmud, qui attestent chez les Juifs l’existence d’une doctrine secrète sur la nature de Dieu et de l’univers, au temps où nous faisons remonter la science kabbalistique.
Dernière mise à jour:2009-03-08 11:23:26 |